Dernières mises à jour
Shearwater – Animal Joy (2012 / Sub Pop)

Il y a des CV qui impressionnent. Le mien entre autres (je cherche du travail, je vous l’envoie quand vous voulez), mais surtout celui de Shearwater. Tout part d’Okkervil River dont deux membres décident de créer un projet parallèle afin d’enregistrer des chansons éloignées de ce qu’ils font d’ordinaire. Les rejoint le batteur des Swans, les signe le label de Nirvana, et on obtient l’un des plus jolis groupes d’Indie américains actuels, qui propose une pop-rock mélancolique, un peu sombre et baroque, simple et légère. On les compare à Coldplay, à Dredg, parfois à The Cure ou Moist aussi.

Shearwater a ceci d’exceptionnel que, bien qu’accessible à tout public, il revêt une sophistication discrète et rafraîchissante. Rien n’est inédit dans les compositions, le son, la production ; mais l’écriture est impeccable, les finitions parfaites, et une vraie personnalité ressort de chaque titre, exprimée par le soin apporté aux moindres détails et par l’interprétation de Jonathan Meiburg, qui s’il n’a pas une grande voix, sait exactement comment la placer. En bref, Shearwater ne commet presque jamais de faute de goût.

Le groupe s’est toujours appliqué à jouer avec les éléments naturels dans sa musique. Rook était doux et fluide comme de l’eau fraîche, entre flot, clapotis et calme. La poussière et la cendre étaient omniprésentes dans Winged Life, avec sa folk aérienne empreinte des sables du désert. The Golden Archipelago revêtait l’habit d’air pur de vertes prairies. Sur Animal Joy, place au minéral et à la terre âpre. Les guitares sont plus râpeuses, le son plus rocailleux.

Animal Joy est donc plus dur et un peu moins dans la mélancolie, même si la formule ne change pas du tout au tout ; à l’exception de quelques titres (”Insolence” et “Put the banner down”), c’est un rock plus brut qu’on retrouve ici. Toujours de jolis sons (envolées de claviers ou de harpe), toujours la voix doucereuse de Jonathan Meiburg, mais plus d’énergie et de frappe aussi. Mais au même titre que le reste de leur discographie, l’album est équilibré, on ne s’ennuie pas, la production et les arrangements sont sans défauts. L’écriture peut parfois être légèrement en deçà de ce que l’on pouvait attendre, certaines chansons frôlant parfois la facilité ; toutefois, elles restent efficaces dans leur registre.

Tout cela, ces allusions à la nature et aux éléments, peut sembler tarte, démagogue, hippie, mais Shearwater n’a pas vraiment ces prétentions-là. Le groupe aime s’inspirer de la nature, mais n’en est pas à l’embrasser à chaque mot, à prôner de fouler ses chemins nus pieds, à inciter à sa défense. Elle est là pour donner une ligne de conduite à un disque, qui s’en retrouve chargé d’émotion(s) et cohérent. Un beau moment, et un coup de cœur à n’en pas douter.



  1. Quel silence. Pourquoi ne pas prendre la parole?