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Amanda Palmer & The Grand Theft Orchestra – Theatre Is Evil (2012 / 8ft. Records)

Amanda Fucking Palmer est une femme libre. Vraiment libre. Libre d’apparaître nue dans ses clips sans que ce ne soit ni vulgaire ni érotique. Libre d’avoir des poils sous les bras sans être classée dans les lesbiennes over-hardcore. Libre de parler foufoune ou avortement un grand sourire aux lèvres. Libre de faire du rock avec un ukulélé. Libre d’avoir un parcours musical où elle n’en a toujours fait qu’à sa tête, qu’à son cœur, qu’à ses tripes.

Issue du théâtre de rue, Amanda Palmer a toujours été entourée d’hommes, mais loin d’être le faire-valoir un peu potiche en micro-short, c’est le rôle de cheftaine de la bande qui lui va le mieux. Ainsi, après avoir monté le gothico-punk cabaret brechtien des Dresden Dolls avec le batteur Brian Viglione, avoir épousé l’écrivain Neil Gaiman, voilà qu’elle dirige une petite troupe de musiciens créatifs baptisée The Grand Theft Orchestra, rien que cela. Pour cet album, elle a écrit toutes les chansons après s’être payée le luxe de claquer la porte de sa maison de disques, n’appréciant pas d’être coupée au montage de son propre clip pour un ‘ventre trop gras’. Libre, on avait dit.

Du coup, elle fonde son propre label, et passe par le site participatif Kickstarter pour financer et promouvoir cet album bien avant sa sortie. Faisant confiance à sa base de fans très enthousiastes et très actifs, le pari est vite réussi. Amanda Palmer entretient en effet avec ses fans une relation très 2.0 et très chaleureuse, n’hésitant pas à communiquer directement avec eux, avec elles, et ayant gagné une confiance sans limite qui leur a fait financer le projet en ayant entendu à peine quelques notes.

Enfin voilà, l’album Theatre In Evil est donc disponible, prêt à être mis entre toutes les mains et entre toutes les oreilles. Pour les exemplaires pré-commandés sur le net, huit chansons de plus (dont une reprise de Lana Del Rey qui finit d’enfoncer l’imposture à bouche d’anatidé), des petites vidéos surprises, et dans l’enveloppe, une page déchirée d’un annuaire avec une spéciale dédicace selon l’inspiration (pour ma part : le nom de Jessica Robbins, première partie de ses concerts, écrits sur la page jaune des plannings familiaux et centres pratiquant l’avortement).

La première chose qu’il faut bien dire, c’est que cet album est dense. C’est un gros pavé dans lequel Amanda Palmer a mis tout ce qu’elle avait en son âme survoltée. On peut regretter parfois le manque d’unité visible de l’ensemble. Plus qu’une pièce de théâtre, ce sont là des saynètes sans lien global immédiat. De plus, les mauvaises langues auront vite fait de railler le recours démesuré d’AFP à son synthé et à son keytar (clavier + guitare), donnant à certaines chansons une touche années 80 à la fois trop surannée et trop à la mode, finalement (”Melody Dean” et ses accords qui rappellent volontairement le ”My Sharona” de The Knack).

Cela dit, cet album est une réussite magistrale. De la pop (”Want It Back” et son clip magnifique) à la ballade mélancolique aux accents mi-Dresden Dolls, mi-Tori Amos (”Trout Heart Replica”), du punk rock (”Olly Olly Oxen Free”) au mid-tempo teinté d’électronique (”Grown Man Cry”), Amanda Palmer place sa voix partout et évolue comme on nagerait en eaux claires et bouillonnantes, emportant immédiatement qui écoute et évolue avec elle. Rien à faire, cette femme met les doigts dans la prise alors qu’elle est encore mouillée, part dans tous les sens, on la suit partout, à chaque fois. Son énergie et sa spontanéité transparaissent dans tous les morceaux, comme autant de gages de cette honnêteté de plus en plus rare dans les sorties d’albums de ces derniers temps, formatés à la machette par des labels avides de fadeur rapidement rentable. Pas de voix arrangées informatiquement, pas de samples incongrus, juste la ‘carte de la Tasmanie’ (surnom donné à… Qui visualise une carte comprendra) et le couteau de la cheftaine, d’un bout à l’autre du projet.

Cela dit, il ne faudrait pas croire que tant de vivacité veut dire album enregistré à la va-vite et peu mixé pour faire artificiellement ‘roots’. Cet album est le fruit de quatre ans d’écriture puis d’un enregistrement et d’une production soignés. Il y a un travail acharné et volontaire là derrière. Car le but ultime de l’aventure musicale et artistique d’Amanda Palmer est de faire bouger les lignes, de soulager les oreilles, de sortir de la bonne musique à partager et de changer la donne. Et c’est fucking réussi !

WE ARE THE MEDIA!

  1. Meow Meow Introduces The Grand Theft Orchestra
  2. Smile (Pictures or It Didn’t Happen)
  3. The Killing TypeAmandaPalmer_keytar
  4. Do It With a Rockstar
  5. Want It Back
  6. Grown Man Cry
  7. Trout Heart Replica
  8. A Grand Theft Intermission
  9. Lost
  10. Bottomfeeder
  11. The Bed Song
  12. Massachusetts Avenue
  13. Melody Dean
  14. Berlin
  15. Olly Olly Oxen Free

Site officiel d’Amanda Palmer : http://www.amandapalmer.net/

Twitter officiel (et très actif) d’Amanda Palmer : http://twitter.com/amandapalmer

Site de Kickstarter : http://www.kickstarter.com/



  1. Quel silence. Pourquoi ne pas prendre la parole?