Yael Naim – Older (2015- Tôt ou tard)

Effaçant les cases de la marelle de la soul conventionnelle, Yael Naim pousse le palet là où les limites de craie ont disparu. Son œuvre se nourrit de braises, sa voix l’égraine tandis que ses yeux de rapace (comme sa musique) hypnotisent l’auditeur. L’artiste a attendu sept ans après New Soul pour sortir un album précieux où sa créatrice règle son compte à l’homme lorsque cela est nécessaire (“Coward” – trouillard), fait partager le vertige fascinant de la maternité (“Make a child”).

 On pense à Joni Mitchell pour son blues-folk et à Amy Winehouse pour les déchirures et les blessures. Toujours accompagnée par le percussionniste David Donatien, l’artiste donne une intensité à toutes ses interprétations parfois sulfureuses. L’émotion ruisselle de motets qui font de l’auditeur le captif consentant d’un processionnal de titres. Ils conduisent parfois jusqu’en bordure de ravins sans y tomber jamais.

Chaque titre est un chemin de traverse animé par un souffle rare. Il crée des abris sous les tempêtes et  noue douleur et plaisir entre force et faiblesse, que les modulations de la chanteuse soulignent avec subtilité dans un miracle d’alchimie entre les mots et les sons. L’artiste crée là un journal intime en différentes cases : elles construisent une marche pour la vie et ses illuminations. Older n’est donc pas un retour en arrière : être plus vieux permet à l’avenir de se réaliser un peu mieux. Les souvenirs à force de  tituber finissent par se dissiper.

 

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A propos JPGP
Honorable poète, fin critique et mélomane terrible.

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