Michele Mari – Pink Floyd en rouge (2011 / Le Seuil)

pferPink Floyd en rouge est un roman psychédélique. Pas n’importe lequel. Il est sous-titré par son auteur italien : ‘roman en 30 confessions, 53 témoignages, 27 lamentations dont 11 outre-mondaines, 6 interrogations, 3 exhortations, 15 rapports, une révélation et une contemplation’… On pourrait s’attendre à une esbroufe et craindre le pire. Il n’en est rien. La fiction tourne autour de Syd Barrett fondateur du Pink Floyd. La schizophrénie – dont le LSD fut largement mais pas uniquement la cause – et le génie du créateur sont analysés à travers des témoignages réels ou fictifs. Entre autres ceux d’Michaelangelo Antonioni, Bob Geldorf, Alan Parsons, Brian Jones, David Bowie, Stanley Kubrick, les Pink Floyd bien sûr – Richard Wright (l’homme rat), Nick Mason (l’homme chien), David Gilmour (l’homme chat) et Roger Waters (l’homme cheval) – et les parents de l’artiste. Mais ils ne sont pas les seuls. A côté d’anonymes surgissent des personnages des chansons du groupe. Arnold Layne, le gnome de la chanson éponyme. Tandis que Pink Anderson et Floyd Council, sont représentés sous forme chimérique de siamois. Monstre rose et monstre fluide au sang fluant arrivent à la rescousse pour réinterpréter la réalité.

Un tel roman dépasse la passion (ou l’indifférence) qui peut s’éprouver au sujet du plus célèbre ensemble psychédélique de la musique pop . Fantastique et poésie sont au service du ou plutôt d’un réel. Pour autant, ce montage en collages n’est pas ce qui est écrit sur la 4ème de couverture. A savoir un « opéra rock ». C’est bien plus un livre sur le doute et la déraison. Psychédélique donc à sa façon. La foule des témoins se mêle à l’enquête d’un chapelier fou. Elle nous fait passer de l’autre côté du miroir. Confessions, témoignages, lamentations donnent au roman un aspect « chasse au snark » carrollien. L’enquête hybride permet de remonter le fil d’un mythe.

Sous l’apparence de réalité, Michele Mari crée une étrange machine littéraire célibataire, désirante plus que délirante. Elle n’est pas une simple illustration de l’aventure du Floyd. Le livre représente lui-même une fantastique dérive, une mise en abîme. Explosive et implosive la fiction joue entre déconstruction et reconstruction à l’aide d’une multitude de pistes. Et Pink Floyd en rouge débouche sur une cohérence imprévue. Rare dans sa structure et son écriture, le roman dit beaucoup sur la musique. Sa forme littéraire du procès, sa dramaturgie autour de Syd Barrett offrent une histoire passionnante sur le génie et la folie d’un homme ainsi que sur la scène artistique anglaise. A ne pas rater



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