Fujiya & Miyagi – Light Bulbs (2008 – Groenland Records)

Fujiya & Miyagi

L’électro de Fujiga & Miyagi – en passant des quelques miles qui séparent leur port d’attache, Brighton (un des berceaux de ce genre musical) aux studios de Londres – ouvre à une musique aussi robotique que rêveuse. Reprenant à sa manière les traitements qu’ont installé il y a bien des années maintenant les Talking Heads ou Kraftwerk, le groupe offre une sorte de nonchalance en marge et une forme d’abandon, de lâcher-prise par rapport à tout ce qui se fait de branché sur ce marché.

Fujiya et Miyagi semblent donc hors de saison dans le new swinging London. Sans souci pour leur look, ils font figure d’électrons libres au sein d’un univers plus souvent happé par les décibels que la rêverie. Difficile donc de les classer dans une quelconque catégorie, caste ou mouvance.

Avec son troisième album, Light Bulbs, le groupe continue son chemin de traverse empreint de fluidité méditative qui ne bascule jamais dans une emphase faussement gothique. Capable d’établir des ponts entre divers apports a priori inaliénables, la voix neutre, apparemment plate voire fade de David Best, est là pour réunir le bataclan des influences disparates en une atonalité. Paradoxalement c’est elle qui, au milieu de machines, transforme la musique sérielle en une suite de mélopées enveloppantes. Parlant de leur album avec moins d’autosatisfaction que d’humour, Best définit Lightbulbs et ses ingrédients hétérogènes, luminescents de la manière suivante : “James Brown sous Valium, Wire tombé dans la pop, Serge Gainsbourg avec un diplôme en électronique épaulé par David Byrne et produit par Eno. Du darwinisme qui aurait mal tourné”.

Fugiya & Miyagi, par le travail sur les sons, cherche de la sorte à interroger la perception que l’on a autant de la musique que de la réalité. Par le biais de métamorphoses, distorsions et d’anamorphoses, il trompe les habitudes de notre écoute et se fait le magicien d’illusions nécessaires pour supporter le quotidien et le métamorphoser pour un temps en particules de rêves. Toujours prêt à expérimenter les sonorités digitales, le groupe n’a cesse d’explorer différentes techniques de la musique électro. D’une part, elle devient une suite de polaroïds de notre monde où les sons – que l’on croit reconnaître et qui semblent aussi familiers que du Kraftwerk – se dérobent. D’autre part, un tel album mêle intuition sensible et procédés sonores qui se jouent de notre façon d’écouter une musique. Il ne cesse nous faire planer mais de manière intelligente car au départ l’opus semble bien ancré dans le réel. En investissant un lieu dédié généralement au dancefloor, le groupe de Brighton permet de découvrir et d’explorer l’alchimie de son travail capable de fixer par l’éphémère des cascades oniriques. Ces dernières s’appuient sur les étapes antérieures et expérimentales d’un groupe sans étiquette et dont le son n’offre que peu de prise à la récupération.

Jean-Paul Gavard-Perret

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A propos JPGP
Honorable poète, fin critique et mélomane terrible.

1 Commentaire le Fujiya & Miyagi – Light Bulbs (2008 – Groenland Records)

  1. Zartampion // 21 décembre 2008 á 15:25 //

    Un des meilleurs concerts que j’ai vu cette année !

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