Lee Konitz, Brad Mehldau, Charlie Haden, Paul Motian – Live at Birdland (2011/ ECM)

liveatbirdlandJ’ai un faible pour le pianiste Brad Mehldau. Autant ses sets solos restent tout compte fait assez quelconques autant ses prestations au sein de diverses configurations – dont le quatuor qu’il forma au début des années 90 – sont exceptionnelles et n’ont pas pris une ride. En 1997, pour une session Blue Note le pianiste se joint entre autres au saxophoniste Lee Konitz et au bassiste Charlie Haden. A l’époque, Mehldau est encore un poids coq face à ces deux géants du jazz. Et cette collaboration va contribuer beaucoup à la notoriété du pianiste. Ce set non prémédité (ou presque) auquel se joignit Paul Motian à la batterie est un pur chef-d’oeuvre live tant sur le plan de l’envol que celui de la maîtrise. Aucun artiste ne tire la couverture à lui et tente de jouer les divas. A l’inverse, chacun se met au service des autres quel que soit le degré de notoriété. Mehldau sait comme personne souligner les plaintes de sax de Konitz en créant autour de ses improvisations une atmosphère aussi ascétique que relaxe.

Parfois solaire, souvent nocturne, le jeu de Mehldau est déjà exceptionnel et tout au long du concert il demeure au niveau de ses comparses. Pour s’en convaincre il suffit d’écouter dans cette version scénique des morceaux tels que “Lullaby of Birdland”, “Solar” ou encore “You Stepped Out of a Dream”. Dans ce dernier, Haden et Motian créent un accompagnement aussi précis que discret alors que Konitz développe les distorsions sonores dont il a le secret. Mehldau quant à lui se contente du suggérer une sorte de rapsodie à l’esthétique aérienne et raffinée.

Certes, à l’époque de ce quatuor, le pianiste même s’il n’a pas la notoriété d’un Konitz et d’un Haden n’est pas un perdreau de l’année. Il a déjà derrière lui – et cela se sent – des albums tels que New York-Barcelona Crossing,, When I Fall in love (avec Jorge et Mario Rossy et Perico Sambeat), Consenting Adults (avec Mark Turner, Peter Bernstein, Larry Grenadier, Leon Parker) et surtout Alone Together (1997) dont l’album live qui paraît aujourd’hui est la charpente. Il sera suivi un peu plus tard avec les même de Another Shade of Blue.

Plus tard le pianiste cohabitera avec des artistes aussi divers (et la liste est partielle) que Joel Frahm, Renée Fleming et (surtout) Pat Metheny. En dehors de ses propres compositions et des reprises de grands classiques du jazz, on lui doit aussi depuis ses dernières années des séries reprises : elles passent des standards des Gershwin à ceux du rock et de la pop. Plusieurs titre de Radiohead (”Paranoid Android”, “Exit music”, “Everything in its right place”, “Knives out”) ou des standards de Nick Drake, des Beatles, d’Oasis et de Paul Simon. Ces reprises font désormais parti de son fond de commerce discographique et scénique. On peut le regretter même si Mehldau y imprime toujours sa patte et son style. Néanmoins un CD tel que Live at Birland nous replonge dans ses grandes années. Avec Konitz et plus tard Metheny l’artiste compositeur et exécutant aura forgé un stade particulier de la musique pianistique. Elle est empreinte d’une force en demi-teinte, de délicatesse et d’une étrange beauté sous forme de berceuse acidulée.



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